Peut-être avez-vous rêvé un jour, de remplir votre déclaration de revenus, de l'adresser (à la dernière minute, comme d'habitude) à votre centre des impôts, et qu'on vous dise, "non merci, on a ce qu'il nous faut, gardez vos sous, et bonne journée". Dans certains pays, ce genre de chose peut arriver, et la levée de fonds annuelle par le biais d'une grosse usine à gaz a été remplacée par des modes de prélèvements plus adaptés. Taxe sur le travail, sur les produits importés ou monopoles d'état, d'une manière ou d'une autre, tout le monde contribue à l'effort collectif, mais sans le douloureux passage par la case "déclaration des revenus honnêtement gagnés l'an passé". Voilà comment ça marche :
Andorre
L'économie d'Andorre est un mystère : pas d'impôts sur le revenu, une TVA ridicule, pas de taxe sur la fortune... mais où donc le pays trouve-t-il des sous? A cela, les Andorrans vous répondent "mais pour quoi faire?". 2% seulement de fonctionnaires, une population de ville moyenne française, les droits de douane générés par les touristes venus faire le plein d'alcool et de cigarettes tous les week-end devraient maintenir l'économie locale à flot.
Arabie Saoudite
Une autre stratégie, celle qui consiste à dire : "on a du pétrole, plein, et on compte bien en profiter". Du coup, les locaux sont épargnés par la politique fiscale, tout comme ceux qui viennent mener dans le pays toute autre activité. En revanche, les chercheurs d'or noir étrangers, eux, sont tenus de payer leur droit d'entrée chez le premier pays exportateur de pétrole. 20% des revenus des étrangers dans ce secteur sont ainsi prélevés pour rentrer dans les caisses du pays auxquels s'ajoute l'aumône obligatoire des musulmans, le Zakât, calculé en fonction du patrimoine.
Barhein
Comme pour l'Arabie Saoudite, pays avec lequel le Royaume partage le champ pétrolier d'Abou Safa, Barhein tire l'essentiel de ses revenus de l'attractivité de son sous-sol. Pour faire le compte, le gouvernement local taxe les loyers des résidents étrangers sur le territoire et peut compter sur un important secteur financier depuis que les banques de Beyrouth ont fui la guerre en 1975. L'accueil des réfugiés, en cas de conflit, peut parfois être une activité lucrative. Bien joué.
Voilà une politique économique brillante : regrouper des gens très riches sur un archipel du Pacifique en leur promettant un taux d'imposition nul et récupérer de l'argent en surtaxant les indispensables produits importés. Les Bermudes sont un des endroits les plus chers de la planète et un paradis fiscal. En clair, pour pouvoir tirer son épingle du jeu, il faut davantage épargner que consommer, et donc être très très riche. Brillant, on vous dit.
Pour se permettre le luxe de n'exiger aucun impôt direct aux citoyens, c'est quand même bien pratique de pouvoir compter sur des réserves immenses de pétrole brut et de gaz naturel. Ça permet par exemple de demander un impôt sur les sociétés de 55% aux entreprises qui viennent exploiter ces ressources. Comme quoi, aux Émirats, on a du pétrole et on a des idées, ce n'est pas incompatible. Et puis, bon, l'aide sociale quand on dispose de la population affichant le plus haut revenu par tête de la planète, ça reste gérable.
Un cas d'école : il y a quelques années, cet archipel des Antilles a fait le choix du prélèvement des impôts à la source. L'impôt sur le revenu, qui existe toujours dans la nomenclature fiscale du territoire, a donc été ajusté à 0%. Et virtuellement, les employés ne paient donc plus d'impôts, mais ce sont les sociétés qui sont taxées sur le travail. Supposons que l'on mène cette opération totalement neutre en France, on imagine la révolte des entrepreneurs expliquant qu'on taxe trop le travail et qu'on asphyxie les entreprises. Demander aux entreprises de payer une somme de la fiche de paie en amont ou demander aux salariés de payer cette somme après, c'est exactement la même chose.

Koweit
Plutôt que taxer les salariés, autant les employer et les payer comme on veut. Seulement 7% des travailleurs locaux évoluent dans le privé, les autres étant actifs dans le service public, notamment dans le pétrole, source de 90% des revenus de ce petit pays. Quand on a une entreprise publique comme la Kuwait Oil Company, a-t-on vraiment besoin d'aller demander des impôts sur le revenu à ses salariés?
Monaco
Il n'y a pas d'impôts sur le revenu à Monaco. Mais calmez-vous, si vous êtes Français et si vous n'y êtes pas installé depuis 1957, vous continuerez à adresser votre déclaration à Bercy, inutile de déménager là bas dans la semaine. Malgré ce manque à gagner, la Principauté s'en sort correctement, en taxant notamment les casinos et en conservant un monopole dans certains secteurs, comme pour la distribution de tabac et, jusqu'il y a peu, les télécoms. Et comme pour la plupart des économies de cette liste, les revenus des résidents monégasques font que l'aide sociale et le soutien aux plus démunis sont peu exigeants en moyens financiers.
Qatar
Le Qatar peut compter sur ses réserves de gaz pour faire tourner la boutique. L'argent collecté par les fonds d'investissement souverains et par l'impôt sur les sociétés des entreprises exploitant cette ressource semble suffire à assurer aux Qataris un train de vie confortable. Si les étrangers sont exempts de tout impôt sur leurs revenus, les locaux sont tenus de contribuer à leur couverture médicale, à hauteur de 5% de leurs rentrées d'argent.
Îles Caïmans
Autant d'habitants qu'une sous-préfecture française, pas de véritable système de sécurité sociale, des retraites directement financées par les entreprises, les Caïmans n'ont pas besoin de beaucoup de rentrées fiscales pour fonctionner. Et puisque l'archipel bénéficie d'un revenu annuel de 326 millions de dollars par le tourisme, le pays peut même se permettre d'être conciliant avec ce que contiennent les banques hébergées dans le coin. Pour le reste, taxons les produits importés, le budget est bouclé, bravo les gars
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